Le premier ministre a suivi l'avis de la Commission consultative du secret de la défense nationale (CCSDN), qui n'a pas voulu faire déclassifier des documents conservés au siège des services secrets.
La réponse a été rapide. Au lendemain de la demande du juge en charge du volet financier de l'affaire Karachi, de perquisitionner à la DGSE, Matignon a opposé une fin de non-recevoir. Le juge d'instruction Renaud Van Ruymbeke enquête sur une éventuelle corruption lors de la présidentielle de 1995 qui pourrait être liée à l'attentat de Karachi : onze Français avaient péri dans cet attentat, le 8 mai 2002.
Dans le cadre de son enquête, Renaud Van Ruymbeke a fait sa demande de perquisition à la DGSE (Direction générale de la sécurité extérieure) jeudi dernier. Plus exactement, il a demandé la déclassification temporaire des locaux de la DGSE, pour mener à bien cette perquisition. Et saisir ainsi tout document relatif à l'enquête, comme le contenu des écoutes téléphoniques réalisées en 1995 sur des membres du cabinet de François Léotard lorsqu 'il était ministre de la Défense.
Le juge agissait juste après les propos de Charles Millon sur le volet financier de cette affaire. Mercredi dernier, l'ancien ministre de la Défense avait en effet fait état d'une enquête de la DGSE en 1995 confortant des soupçons de rétro-commissions sur le contrat de vente de sous-marins au Pakistan.
Selon une source proche du dossier, la demande du juge Van Ruymbeke a donc été rejetée par François Fillon dès vendredi dernier. «La déclassification temporaire de tout ou partie des locaux de la DGSE ne peut recueillir mon accord», a écrit le premier ministre dans sa réponse, «compte-tenu en particulier de l'avis défavorable émis ce jour par le président de la Commission consultative du secret de la défense nationale» (CCSDN). Toutefois, il souligne avoir demandé au ministère de la Défense, dont dépend la DGSE, d'identifier les documents sollicités par le juge. Ce dernier pourrait alors demander la déclassification.
«Que la justice puisse travailler sans entrave»
Une récente loi a modifié l'accès aux documents classés secret défense. Le juge doit désormais saisir l'autorité administrative à l'origine de la classification, qui se tourne alors vers la CCSDN, qui dispose de deux mois pour rendre un avis consultatif. Jusqu'à présent, les avis de la CCSDN ont, dans la très grande majorité des cas, été suivis par l'autorité concernée, que ce soit un ministère, l'Elysée ou Matignon.
Hasard du calendrier, le juge d'instruction antiterroriste, Marc Trévidic, a écrit lundi matin à Alain Juppé pour demander une nouvelle fois la déclassification de certains documents. Alors que sa première demande remonte au 5 mai 2010, le juge affirme n'avoir obtenu à ce jour aucune réponse.
Le Parti socialiste a de son côté réclamé lundi que la justice puisse travailler sans entrave dans cette affaire. Il a également souhaité une relance de la mission d'information parlementaire, qui a terminé ses travaux au printemps dernier, compte tenu des «éléments nouveaux» après les déclarations de Charles Millon.
Samedi, en marge du sommet de l'Otan, Nicolas Sarkozy a affirmé que «l'État aiderait la justice en lui communiquant tous les documents dont elle aura besoin»।
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