Tunisie

dimanche 13 mars 2011

Le "vote musulman" n'existe pas

© AFP/Archives - Fred Dufour
Les musulmans, dont un représentant a été limogé vendredi de son poste de conseiller à l'Elysée pour avoir critiqué le débat de l'UMP sur la laïcité et l'islam, ne forment pas un "bloc électoral" uni même s'ils ont parfois été séduits par Nicolas Sarkozy en 2007, selon des experts.
Le débat prévu le 5 avril a déjà fait une victime: nommé en janvier conseiller technique en charge de la diversité à l'Elysée, Abderrahmane Dahmane a annoncé son limogeage au lendemain de ses très vives critiques sur ce débat lors d'une réunion à la mosquée de Paris.
En 2007, il avait mené campagne pour Nicolas Sarkozy en banlieue et dans les milieux de l'immigration avant d'être décoré de la Légion d'honneur par le président l'an passé.
Mais jeudi, sans s'en prendre à Nicolas Sarkozy, il a critiqué vertement son parti, jugeant que "l'UMP de Copé c'est la peste pour les musulmans" et appelant ses coreligionnaires à "ne pas renouveler leur adhésion" au parti présidentiel.
Avec ce limogeage, Nicolas Sarkozy "vient de me rendre ma liberté, je vais me mettre en campagne pour défendre la dignité des musulmans de ce pays", a réagi vendredi M. Dahmane.
Selon la sociologue Nacira Guenifi, qui parle d'une "convergence des comportements électoraux" avec ceux de l'ensemble des Français, les électeurs musulmans "se distribuent sur l'ensemble de l'échiquier politique".
Leur vote est "très dispersé" et "n'exprime pas l'appartenance religieuse", confirme le président du Conseil français du culte musulman (CFCM), Mohamed Moussaoui.
© AFP/Archives - Jack Guez
© AFP/Archives - Jack Guez
Lors de la dernière présidentielle, des musulmans n'avaient pas caché leur préférence pour Jean-Marie Le Pen qui avait choisi une jeune fille d'origine nord-africaine pour illustrer l'une des affiches de sa campagne.
Un étudiant en histoire de l'art avait alors expliqué à l'AFP qu'il partageait avec l'ex-dirigeant frontiste "certaines valeurs morales" comme l'interdiction du mariage homosexuel.
Mais en 2007, il y a surtout eu un "effet d'aubaine" profitable à Nicolas Sarkozy qui avait mis en avant des icônes venues de pays musulmans comme Rachida Dati, de père marocain et de mère algérienne, et Rama Yade, de parents sénégalais, selon Mme Guenifi.
Cette stratégie a engendré "un transfert de voix sur Nicolas Sarkozy et non sur la droite", analyse la sociologue. Mais, pronostique-t-elle, ce "moment d'émerveillement électoral ne pas vas se reproduire en 2012 car la politique d'affichage outrancière" de M. Sarkozy a abouti à "un désenchantement".
Au gouvernement, les figures de la diversité "n'ont jamais été en position d'exercer le pouvoir" et "ce qui reste finalement dans le marbre ce sont les lois de plus en plus répressives" de Mme Dati alors que Fadela Amara "a joué le rôle de fossoyeur de la politique de la ville", accuse Mme Guénifi.
"Il n'y a pas de vote musulman mais des musulmans qui votent pour des valeurs et chacun en fonction de ses références", remarque Akli Mellouli, élu socialiste.
Par contre, dit cet adjoint au maire de Bonneuil (Val-de-Marne), "il y a un vote anti-musulmans que l'UMP veut disputer au FN" avec le dévat sur l'islam qui a soulevé la colère de représentants musulmans jeudi, dont M. Dahmane.
Le recteur de la Grande mosquée Dalil Boubakeur a appelé le président de la République à annuler ce débat et un militant du Gard, Abdallah Zekri, chargé de mission au CFCM et aumônier musulman des hôpitaux, a déchiré sa carte et appelé "tous les musulmans de l'UMP" à l'imiter.
Par Amer OUALI
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