Tunisie

samedi 14 mai 2011

Le souverain martyr

Moncef BEY

Sadok

 

19 juin 1942-15 mai 1943: le règne de Moncef Bey, aura duré 11 mois dont près de 7 mois marqués par une campagne militaire qui a transformé la totalité du territoire national  en un gigantesque champ de bataille où Alliés et forces germano-italiennes placés sous l'autorité de chefs militaires prestigieux comme Eisenhower, Bradlee, Patton, Montgomery ou Rommel  se livrèrent quelques unes des batailles les plus importantes de la  2ème Guerre Mondiale.

Les témoins de cette époque comme Sadok Zmerli, premier interprète et chef  du protocole de Moncef Bey et auteur de "Espoirs et Déceptions  en Tunisie 1942-43", aujourd'hui épuisé, ainsi que le Professeur Said Mestiri à qui on doit également une biographie de ce souverain nous ont décrit le combat courageux d'un grand patriote, bien entouré il est vrai  de conseillers habiles pour faire respecter la souveraineté du pays, malgré les convoitises des pays de l'axe et surtout de l'Italie et l'arrogance du représentant de Vichy, l'Amiral Esteva.  Peine perdue. Dans un pays ravagé par la guerre, l'autorité du Bey se réduisait à Tunis et sa banlieue. Cultivé, proche des nationalistes, Moncef Bey avait tout pour être un grand roi. Pour son malheur, il est arrivé sur le trône au mauvais moment. Bien que son attitude fût irréprochable pendant la guerre, il fut déposé par le Général Juin, qui trouvait là une occasion en or pour débarrasser la France d'un souverain incommode et  qui, au surplus, ne faisait pas mystère de ses sentiments nationalistes, quelques jours à peine après la fin de la bataille de Tunisie. Déposé le 15 mai 1943 et exilé dans le sud algérien puis à Pau dans le sud de la France, il mourra le 14 mai 1948 sans avoir jamais revu sa patrie. Il restera dans l'histoire  comme "le Souverain martyr", celui qui s'est identifié à son peuple pendant toute la période qu'aura duré son règne, s'efforçant  d'alléger ses souffrances et de lui remonter le moral à un moment crucial de son histoire.

On a longtemps péroré sur le point de savoir si la dynastie husseinite aurait pu échapper au sort qu'elle avait connu le 25 juillet 1957 si le règne de Moncef BEY s'était prolongé au delà de la proclamation de l'indépendance. Certainement pas car le ver était déjà dans le fruit. D'ailleurs, ne prêtait-on pas à ce Bey, l'intention d'abolir lui-même la monarchie et de proclamer la république. Le 25 juillet 1957, cela faisait quatre vingt ans que le Bey n'exerçait plus la réalité du pouvoir. il aurait fallu plus qu'un épisode de 11 mois pour ressusciter une monarchie anachronique.